Les Gens du Mag : Emil Friis Ernst

Des robots, des méchants, et des personnages venus d’ailleurs… Non, vous n’êtes pas dans le laboratoire d’un Antihéros, mais bien dans celui de l’artiste Emil Friis Ernst. Dessinateur, illustrateur mais aussi réalisateur, Emil est sur tous les fronts. Nous l’avons invité à participer au magazine Kiblind Poils, et c’est, avec grande surprise, un Godzilla au lissage parfait que nous avons reçu en retour. Allez Docteur, parle nous un peu de tes expérimentations.

Illustration originale réalisée pour Kiblind Poils

Voilà un nom qu’il sera bien difficile d’oublier, non parce qu’il est difficile à prononcer, mais plutôt par rapport à son style unique, savant mélange modernité et rétro. Ses histoires d’abord, belles et intrigantes, mélangent différentes thématiques toujours tournées autour de la science-fiction, avec un but plutôt étrange : réconforter ceux qui sont dérangés et déranger ceux qui sont à l’aise.

Nous sommes donc allés à la rencontre de l’illustrateur Danois qui se complait à dessiner des robots solitaires mais qui pourtant nous donne la sensation de n’être jamais vraiment seul face à ses créations.

Bonjour Emil. Peux-tu nous expliquer l’illustration que tu as faite pour notre numéro Poils ?

Bonjour, bien sûr que je peux. Je ne savais pas du tout ce que je devais dessiner sur un sujet aussi vaste que « Poils », alors j’ai choisi de dessiner Godzilla avec une coupe de cheveux au carré. Au départ, je pensais faire « Godzilla VS King Kong : Qui le porte le mieux? » mais j’ai décidé de ne pas me lancer et de ne faire que Godzilla. Beaucoup de gens ont réagit en ligne, en le qualifiant de Trumpzilla ou d’Angela Merkel. Ce qu’aucun de ces imbéciles ne sait, c’est que le nom original de la coupe de cheveux est Prince Valiant, pfff, philistins.

Tu fais beaucoup de bandes dessinées. Quels sont les vieux comics qui t’ont inspiré ?

Tu as raison de dire que je suis inspiré par les vieux trucs mais je ne sais pas si c’est nécessairement vrai quand il s’agit des BD qui m’inspirent. J’ai surtout grandit en lisant des mangas et j’ai effectivement lu ma part de Tezuka et co, mais j’ai été initialement attiré par les premiers numéros de Dragon Ball. A part ça, je suppose qu’il est juste de dire que les BD d’Hugo Pratt peuvent être considérées comme anciennes, je pense que je lis surtout des choses faites dans les années 80 et selon mon père, ce n’est pas si vieux (il dirait ça, étant ancien et tout ça). Guy Davis est un autre favori, je pense que ses préférences pour les robots géants et les vieux trucs mécaniques m’ont incité à devenir le dessinateur que je suis aujourd’hui.

 Cry Punch comics

Peux-tu nous parler de ton processus de création ?

Je dessine toujours plusieurs choses à la fois, il m’est impossible de rester ancré dans un seul projet. Cela devient difficile et très déroutant parfois, mais tant que je m’assure d’avoir un contact avec le monde extérieur, j’y arrive. J’essaie de m’en tenir à des matériaux simples lorsque je dessine et je dessine surtout au format A4, afin de pouvoir voyager avec mon travail autant que possible.

Risoprint 2 couleurs au dos de ce zine

Quels sont tes thèmes préférés lorsque tu dessines ?

J’aime combiner les vieux sujets de science-fiction comme les robots et les avions de chasse avec des thèmes plus sombres comme l’aliénation et la solitude. Pour faire bonne mesure, j’ai commencé à prendre conscience de mettre un peu de fun dans certaines de mes histoires lorsque le ton le permet et j’aimerais faire plus de bandes dessinées qui ne soient pas aussi déprimantes à long terme. Cependant, comme le dit le proverbe, un bon art devrait réconforter ceux qui sont dérangés et déranger ceux qui sont à l’aise.

Comment ton style d’illustration a-t-il évolué depuis tes débuts ?

Je pense que je n’ai fait que copier les artistes que j’aimais jusqu’à ce qu’ils se rejoignent et deviennent moi. Si vous regardez attentivement, vous pouvez trouver certaines de mes inspirations dans certains aspects : Akira Toriyama (humour burlesque), Masamune Shirow (l’arête du nez), Guy Davis (les lèvres), Hugo Pratt (les taches noires), Chris Ware (les transitions d’un moment à l’autre), etc. la liste est longue. J’étais vraiment conscient du style quand j’étais plus jeune mais je ne le suis plus vraiment, maintenant mon défi est de trouver les bonnes motivations pour continuer à travailler sur de longs livres. C’est difficile !

Kitbashing
Zoom

Quelle est l’histoire de Dr Murder ?

Dr Murder était ma première BD lancée en 2019, une édition française devrait être en cours bientôt je pense, ça a été un processus lent. L’histoire concerne l’éponyme Dr Murder et sa dérive existentielle suite à sa rupture avec son ennemi juré Johnny America. Nous avons également lancé un nombre limité de figurines à l’occasion de la sortie de la deuxième impression du livre, avec une calculatrice pour que les enfants puissent s’amuser à calculer les impôts du Dr Murder. C’est une histoire amusante, stupide et triste qui semble un peu dépassée aujourd’hui, mais je l’aime néanmoins.

Peux-tu nous parler de 3 projets qui sont importants pour toi ?

3 projets dans lesquels je suis impliqué ? Eh bien, évidemment, Dr. Murder a été important pour planter le décor de ma carrière de dessinateur et m’a beaucoup aidé à définir ce que je voulais faire.

En ce moment, je travaille sur un projet intitulé Ultrapulp, qui s’inspire de certains thèmes et aspects de Dr. Murder, mais qui est beaucoup plus sérieux à certains égards. Il se distingue de Dr. Murder par le fait que l’univers d’Ultrapulp n’est pas aussi conscient de lui-même que le premier, en d’autres termes, les personnages ne sont pas conscients des règles qui régissent leur univers de la même manière et peuvent être vus comme des pièces d’échecs déplacées au hasard sur le plateau, plutôt que comme des joueurs d’échecs ennuyés par le jeu lui-même. Certaines de ces histoires ont déjà été publiées dans des anthologies telles que Cry Punch Comics et Ex-Mag.

Pages d’avant-première de PROCESSOR, une bande dessinée de 30 pages sur les super robots présentée dans le numéro 1 de CRY PUNCH.

Enfin, j’ai écrit un livre sur le passage à l’âge adulte intitulé Dogma, qui se déroule dans la campagne danoise où j’ai grandi. Au rythme où je dessine actuellement les histoires d’Ultrapulp, j’ose dire que je ne commencerai pas à dessiner dessus avant au moins les trois prochaines années, mais je me suis plus ou moins fait une raison et j’aime pouvoir écrire un peu dessus de temps en temps, quand mon emploi du temps le permet. Tant que je le termine avant d’avoir… Je ne sais pas, 35 ans ? Frissons

EMIL FRIIS ERNST // KIBLIND POILS

Restez Connecté

Recevez nos dernières actus, nouveaux talents et musique

Fermer la recherche