On inaugure ce nouveau format dédié à la pochette de disque, en vous présentant le travail d’orfèvre de l’illustrateur Oscar Raña sur la pochette du groupe K.A.Z.
Au commencement, il y avait les pochettes des 78 tours : des cartons marrons pas très jojo, au mieux habillés du logo d’une des majors du disque de l’époque. En 1940, tout bascule : le jeune directeur artistique de l’une d’entre elles, Columbia Record, a la brillante idée d’ajouter un peu de folie à cet ensemble maussade et surtout, beaucoup de graphisme. Avec ses illustrations minimalistes et ses typographies savamment choisis, Alex Steinweiss réussit un tour de force et case ainsi ensemble deux cherubins qui ne se quitteront plus jamais : la musique et les arts visuels. Toujours prospère, ce mariage d’amour donne naissance aujourd’hui encore à une ribambelle de pochettes de disque illustrées à travers le monde.
Après avoir souvent parlé de cet heureux binôme, on s’est dit qu’il serait plus convenable de leur consacrer un format dédié. Voici donc « Derrière l’artwork », format ayant pour humble vocation de mettre en avant les illustrateur·rice·s qui se cachent derrière ces pochettes élevées au rang d’objets d’art.
Oscar Raña x K.A.Z
Pour inaugurer ce nouveau format, notre coeur s’est dirigé tout droit vers l’hypnotisante pochette du groupe de free jazz K.A.Z réalisée par l’illustrateur espagnol Oscar Raña. Subjugués par cette création folle, dédale de formes libres et de couleurs qui chatouillent l’oeil bien profond, nous nous sommes laissés aller à poser quelques questions au grand maître de la composition graphique.
Quel était le brief quant à la réalisation de cette pochette de vinyle ?
La liberté absolue, ce qui n’est pas vraiment habituel. Le groupe m’a contacté par mail pour me parler de leur musique, basée sur l’improvisation et une forme vraiment libre de jazz. Ils voulaient m’inviter à réaliser leur artwork de la même façon. Ils m’ont fait totalement confiance et j’avais le temps de le faire à ce moment-là, donc c’était vraiment appréciable.
Comment est-ce que tu as procédé ?
J’ai commencé par improviser une composition rapide avec les éléments essentiels de l’image. J’ai ensuite travaillé plus consciencieusement, en faisant attention aux motifs que le design demandait, à la volée. J’ai pensé aux couleurs à la toute fin : j’ai commencé à en appliquer beaucoup (peut-être avec un peu trop d’entrain), et après ça, j’ai réduit la palette en utilisant une référence de couleurs trouvée sur internet.
Écoutes-tu de la musique lorsque tu crées ?
Oui, j’écoute toujours de la musique quand je travaille. Pour cet exemple précis, j’ai écouté K.A.Z tout du long. Ça faisait partie de l’expérience : permettre à la musique de pénétrer le dessin.
Quelles ont été tes inspirations graphiques pour cette création ?
Je n’ai pas été inspiré par quelqu’un en particulier pour réaliser cette pochette. Mais je pense que quand je travaille de cette façon (avec des formes improvisées et qui interagissent entre elles), l’influence de Christopher Forgues se fait sentir.
Cet artwork raconte t’il une histoire ?
Non, il n’y a pas d’histoire ici : juste de l’émotion.
As-tu déjà travaillé sur des pochettes auparavant ?
Oui, ça m’est arrivé. De mémoire, j’ai réalisé les pochettes de The New World de Tom Hang, Fuimos Nosotros de Jay et Say Mama d’Alex Preston entre autres.
Pour toi, quelles sont les plus belles pochettes de tous les temps ?
J’en aime tellement ! J’adore les collages des premiers albums d’Ariel Pink, les pochettes d’Andrew Savage pour Parquet Courts, et beaucoup d’autres comme celle du premier album de Cluster, celle d’Hiroshi Yoshimura pour Green et celle de A. G. Cook pour 7G, pour n’en citer que quelques-unes.