Décryptage : Nos clips animés préférés d’Avril

Chaque fin de mois, Kiblind donne la parole à l’artiste derrière l’artiste : l’illustrateur.rice chargé.e de retranscrire la musique en images. Retrouvez nos clips musicaux animés préférés du mois d’avril décryptés par ceux qui les ont fabriqués.

On ne vous l’apprendra pas : l’illustration est partout. Elle a envahi nos murs, nos comptes Instagram (bon, on y est peut-être pour quelque chose), nos objets, nos vêtements, nos pochettes de disques, notre page Youtube… Et c’est bien normal, il faut dire que c’est elle la meilleure toutes catégories pour faire joliment passer des messages et provoquer des émotions. Les artistes là dessous l’ont bien compris et l’ont utilisé au service d’un autre art capital : la musique.

Voici donc la sélection de nos clips animés et illustrés chouchous du mois d’avril, décortiqués par leurs créateur.rice.s qui ont gentiment répondu à nos questions.

DANA GAVANSKII KISS THE NIGHT

ANIMATION : GAIA ALARI

Bonjour Gaia. Tu as fait beaucoup de clips animés, quelle est ta partie préférée lorsque tu réalises une vidéo ?

Bonjour Kiblind ! J’adore travailler avec des musiciens. Ce que je préfère dans la réalisation d’un clip, c’est découvrir la chanson avec laquelle je dois travailler et faire en sorte qu’elle me  » parle  » d’une certaine manière. J’aime aussi beaucoup découvrir l’esthétique et les influences générales de l’artiste avec lequel je travaille et trouver un moyen de les entrelacer avec ma propre vision artistique, ma touche et mon interprétation, que j’ajoute toujours lorsque je traite un clip.

Tu as aussi réalisé plusieurs courts métrages qui ont été sélectionnés dans des festivals et même primés. Peux-tu nous en raconter un peu plus sur ces films ?

Les courts métrages sur lesquels j’ai travaillé jusqu’à présent étaient des animations expérimentales de courte durée que j’ai réalisé lorsque j’ai littéralement commencé à animer à partir de rien. Au début, je me suis concentrée sur des courts métrages expérimentaux, plus proches de l’art vidéo, que j’ai créé en animation en pâte à modeler. Cependant, depuis peu, je développe des projets plus narratifs en animation 2D, ce qui me réjouit vraiment.

Il semblerait qu’il y ait beaucoup de dessins dans la vidéo  » I Kiss the night « . Peux-tu nous expliquer le processus de création ?

La vidéo est techniquement une animation traditionnelle dessinée à la main, image par image, réalisée avec des pastels gras sur du papier, c’est donc essentiellement un grand flipbook. J’aime beaucoup la chaleur de l’animation dessinée à la main sur papier et les petites erreurs qui se produisent de temps en temps, ce qui m’amène à repenser les séquences à venir comme dans un cadavre exquis. Ça rapproche le dessin de l’écriture, qui – disons le franchement – est une de mes obsessions. J’aime l’idée que l’animation soit un langage visuel puissant avec peu de limites et de règles. Je la visualise comme un code en mouvement fait de lignes, de points, de surfaces, un peu comme les lettres et les symboles utilisés dans le code écrit.

Peux-tu nous expliquer avec tes propres mots l’histoire qui se déroule ici, dans le clip ?

Je dirais que la vidéo trouve son origine dans une expérience personnelle : j’ai souvent souffert de terreurs nocturnes et d’insomnie. C’est quelque chose que je suis encore en train de traiter. Je me suis sentie assez libre pour en traiter visuellement et pour la première fois dans cette animation inspirée par la musique de Dana. Les atmosphères nocturnes évoquées par la chanson de Dana m’ont amené à concevoir une vidéo qui vise à représenter un paysage de rêve ou, plus précisément, le moment de somnolence qui précède l’endormissement. En franchissant la porte de l’espace liminal entre la veille et le sommeil, le personnage efface le monde extérieur et pénètre à l’intérieur de son cerveau. Il fait ainsi l’expérience d’un labyrinthe composé de pièces contenant des visions superposées, une perception déformée de soi, du temps et de l’espace, des pensées intrusives qui vont de séquences ludiques, bizarres et étranges à des souvenirs rassurants, dans le but de s’endormir et de fermer finalement la porte.

Travailles-tu toujours sur des projets de dessins ou d’illustrations ?

Oui, je suis actuellement en train de dessiner et d’animer un clip pour le groupe chilien The Holydrug Couple (Sacred Bones) qui sort bientôt et je vais collaborer dans un futur proche avec le musicien ambient Slow Meadow afin de créer des visuels pour sa nouvelle musique. Je travaille également sur quelques projets narratifs à différents stades de développement, pour le cinéma et la télévision.

Quel est ton projet de rêve ?

Pour le moment, je pense que sortir mon premier film d’animation narratif court (écrit et réalisé par moi) serait suffisant pour me satisfaire pendant un moment. J’ai ébauché un scénario inspiré du sujet qui est au cœur de la vidéo de Dana pour « I kiss the night » ; je suis en train de chercher une production pour développer un peu plus cette idée et voir où ce travail me mène. Plus généralement, je suis une personne agitée et curieuse, je suis toujours à la recherche de quelque chose de plus en plus excitant et difficile. J’adorerais par exemple, m’attaquer à un documentaire animé à l’avenir, ou à tout autre projet, je suis toujours prêt à relever un nouveau défi.

FLAURSUNFLOWER

ANIMATION : JULIAN LAGOUTTE


Salut Julian ! Avais-tu déjà travaillé sur de l’animation avant ce clip pour Flaur ?

Oui, à de nombreuses reprises, mais jamais sur un projet de clip musical. C’était même d’ailleurs le premier gros projet d’animation que je menais seul. J’avais déjà travaillé sur des commandes d’animation quand j’étais à l’école, mais toujours en équipe. Par exemple, nous étions entre 3 et 4 personnes à réaliser à deux reprises la bande-annonce du Festival d’un Jour, un festival du cinéma d’animation à Valence. Nous travaillions avec Nicolas Flory, à l’époque professeur mais aussi directeur du studio d’animation Foliascope, duquel j’ai énormément appris sur les méthodologies de travail et les étapes de réalisation d’une vidéo d’animation.

Quels sentiments et quelles images le morceau t’as t’il évoqué quand tu l’as écouté pour la première fois ? 

À la première écoute, mais aussi à la lecture du titre, il était évident pour moi que le clip serait lumineux et coloré. La sensation de plénitude qu’il procure, mais aussi les petites influences psychédéliques des passages instrumentaux m’ont tout de suite fait penser à des images très oniriques, dans le style du premier plan du clip, avec ces formes globuleuses qui flottent dans l’air, que l’on retrouve finalement régulièrement.

Quel était ton degré de liberté pour réaliser ce clip ? 

Le groupe souhaitait un clip très narratif qui mette en lumière les thèmes de la chanson, que sont le voyage et la découverte de nouveaux horizons. Tout est parti d’un dessin, griffonné par Florian, le chanteur du groupe, qui représentait un personnage marchant sur une route, vu de dos. Ce dessin est devenu le fil conducteur du clip, parce que le plan semblait simple, efficace, tout en permettant des évolutions de décors, ce qui rendait sa réutilisation facile et permettait un certain gain de temps. Pour le reste, j’ai eu une totale liberté. Le groupe m’a même poussé à me lâcher sur la progression visuelle du clip, pour accentuer l’idée d’étrangeté et faire doucement comprendre au spectateur qu’il est dans un rêve. En fait, j’ai un peu pris ce clip comme un terrain de jeu : étant donné que c’était mon premier projet d’animation entièrement seul, c’était pour moi l’occasion de décliner pour la première fois mon univers graphique en animation et de penser à toutes les manières de lui donner vie. En plus, le groupe a toujours eu des retours positifs sur les plans que je leur envoyais, il y avait une grande confiance entre eux et moi.

Peux-tu nous décrire ses différentes étapes de conception?

J’ai commencé par proposer une animatique qui replaçait dans la temporalité de la chanson les différentes idées que j’avais, afin de se représenter plus facilement le rythme et l’enchainement des plans. Ensuite, pour l’illustration, je partais presque systématiquement du papier : je me faisais des planches entières de décors et d’éléments, simplement dessinés au trait, et dont les différentes parties étaient séparées pour pouvoir les animer ensuite. J’ajoutais ensuite la couleur et les ombrages sur Photoshop avant de tout rassembler dans After Effects. Le choix des couleurs s’est fait en fonction de celles que j’ai l’habitude d’utiliser, mais aussi en tâtonnant un peu. Je voulais que le clip ait dans ses couleurs plusieurs phases distinctes, qui suivent la structure de la chanson, avec parfois des moments de rupture, comme lors des passages instrumentaux. 

J’ai tout animé dans After, en m’aidant beaucoup de l’outil « marionnette ». J’ai aussi parfois animé image par image, comme pour la marche du personnage ou le frémissement des météorites. La texture granuleuse des images vient du fait que le groupe aimait particulièrement une illustration que j’avais imprimé en risographie, quelques semaines auparavant, et qui avait donc ce grain spécifique à la riso. J’ai donc essayé d’imiter cet effet avec le filtre « bruit » d’After Effects.

Tu fais partie de Tâche Papier, peux-tu nous parler de ce collectif ?

Le Tâche Papier est une association à Dijon qui a pour but de créer du lien social et de donner accès à la culture à des publics plus ou moins isolés, à travers des techniques d’impression telles que la sérigraphie ou la gravure, mais aussi la risographie. Pour cela, nous intervenons auprès de structures du milieu socio-culturel ou d’écoles pour par exemple imprimer des affiches, des livres ou monter des expositions avec les participants. Nous mettons aussi notre atelier à disposition d’artistes pour les accompagner dans leurs projets d’impression. Nous organisons régulièrement des expositions dans notre atelier et avons commencé à éditer des livres d’artistes et d’illustrateurs, entièrement imprimés et fabriqués à l’atelier, en petites séries.

Quel serait ton projet de rêve en animation ?

Le rêve ultime serait de réaliser un court-métrage, mais je ne n’y pense pas trop pour l’instant, ça me semble très lointain ! Cependant, réaliser un clip était déjà en quelques sortes un rêve. La musique est très importante pour moi, je suis d’ailleurs assez frustré de ne pas avoir eu l’occasion d’apprendre à jouer d’un instrument dans ma vie, alors travailler pour des musiciens et contribuer à l’industrie musicale à ma façon, c’est une façon de compenser. J’espère avoir l’occasion d’en réaliser d’autres, le clip est un bon format pour expérimenter des choses sur des durées qui restent modestes.

CHOSES SAUVAGESCHÂTEAU DE FANTÔMES

ANIMATION : GABRIEL FAVREAU ILLUSTRATION : HURLEVENT
RÉALISATION : LÉA DUMOULIN

Hello ! Vous avez été plusieurs à travailler sur le clip de « château de fantômes ». Pouvez-vous nous expliquer la répartition des rôles ? 

Léa, la réalisatrice a écrit le scénario et avait plusieurs inspirations au niveau du dessin et de la palette de couleurs. C’est un univers qui collait bien avec celui d’Hurlevent, qui a donné vie à tout ça en illustrant le projet. Gabriel, c’est comme l’élément liant. Il conceptualise, crée des transitions et ajoute la texture, c’est l’animateur du projet.

Est-ce que le groupe avait des volontés particulières sur ce clip ou était-ce une carte blanche ? 

Léa : Ça fait maintenant plusieurs années que je travaille avec les gars de Choses Sauvages et leur incroyable équipe. J’ai eu la chance de signer avec Jasmine Lebel (agence Juste du feu) tous les visuels pour la sortie du dernier album : clips, photos et visualizer. Il me font confiance à 100% et c’est ce qui fait que la création est trippante. J’adore l’animation et c’est une façon de me sortir de ma zone de confort et de travailler avec des créateurs qui m’inspirent. 

Pouvez-vous nous raconter les différentes étapes de fabrication du clip, des premières idées au résultat final ? 

 Léa : J’ai conceptualisé le projet en ayant déjà en tête l’esthétique et la technique d’Hurlevent et de Gabriel, donc le processus de design c’est passé assez vite!  

Hurlevent : Nous avions déjà une idée très claire du style de clip que nous voulions. Alors quand le scénarimage et le design des personnages ont été terminés, on s’est tout de suite mis à la production. 

Gabriel : Pour ma part, j’ai du donner vie aux scènes en exploitant la profondeur suggérée par les illustrations et en gardant en tête de mettre l’emphase sur la luminosité et la texture.

Quelles ont été vos références / inspirations pour ce clip ? 

Hurlevent : Les découpages à la silhouette nous ont inspiré dès le début du projet. Nous savions que nous voulions une figure de chien énigmatique. le film Les aventures du prince Ahmed a aussi été un bon point de départ.

Léa : Les fables et la mythologie m’inspirent beaucoup et font partie de mon processus de création. J’aime le concept d’une quête qui semble perpétuelle un peu à la manière d’un jeu vidéo de plateforme. 

Avez-vous d’autres projets en animation / illustration sur le feu ?

Gabriel : Je travaille actuellement sur un clip pour Jonathan Personne et je viens de sortir un clip pour Vanille.

Léa : Je suis sur d’autres projets de clips mais ils ne sont pas en animation

ΣTELLA – UP AND AWAY

ILLUSTRATION : ΥΟΚΑΝΙΜΑ ANIMATION : ΥΟΚΑΝΙΜΑ ET GEORGE KONTOS

Bonjour Yorgos ! Quelle est ta formation en animation ?

Salut ! Eh bien, j’ai fait des études aux Beaux-arts et aussi une formation en tourisme… eh ! C’est lorsque j’étais étudiant en art que j’ai commencé à me frotter au stop-motion. Plus tard, pendant mes études de maîtrise en art et design des médias à l’université Bauhaus, j’ai commencé à apprendre et à pratiquer l’animation numérique. Je dirais que j’étais autodidacte, dans le sens où, au cours d’un programme de maîtrise, l’étudiant doit apprendre rapidement de nouveaux outils et de nouvelles techniques et rendre des projets terminés. Pendant mes études, j’ai travaillé comme stagiaire dans un studio d’animation à Berlin, puis j’ai décidé de tenter ma chance en tant qu’artiste d’animation indépendant, en acceptant différents projets, principalement en Allemagne. Ces dix dernières années, j’ai travaillé principalement comme animateur et illustrateur, mais aussi comme directeur artistique lorsqu’il s’agissait de projets plus importants, comme des documentaires.

Σtella a réalisé le clip. Quel était ton degré de liberté pour l’illustrer et l’animer ?

Σtella est venue me voir avec une histoire en tête, mais aussi avec des idées sur plusieurs scènes, le développement de ces scènes et la manière dont ces idées pourraient être rattachées à la chanson. Il m’a été très utile de discuter avec elle de la trame du récit. Néanmoins, j’ai été autorisé à interpréter ces idées et à essayer quelques variations ou ajouts aux idées existantes. Nous avons pris le temps d’examiner ces idées et de discuter de la manière dont elles pourraient fonctionner dans le film. Bien qu’en animation, il faille être précis pour gagner du temps, j’ai pu improviser un peu sur certaines scènes, même pendant la période de production. En ce qui concerne le design, je pense que nous avons eu la chance de nous mettre d’accord très rapidement sur le style. Stella est arrivée avec quelques références qui étaient suffisamment bonnes pour m’inspirer dans mes décisions de conception. Les images des différents écrans me sont alors apparu instantanément !

Qu’as-tu pensé de la chanson à la première écoute ?

Eh bien, je connaissais déjà le travail de Σtella et je suis un fan de sa musique. Mais l’écoute de la chanson a été une sorte de surprise pour moi. Une agréable surprise ! Les premières choses que j’ai remarqué sont la « couleur » de la chanson (les qualités des sons) et son tempo entraînant. Et puis, inévitablement, je me suis dit…  »À quoi pourrait ressembler le clip d’une telle chanson ? ». Mais oui, j’ai adoré cette chanson. Et je l’aime toujours, même après des centaines d’écoutes.

Peux-tu nous décrire les différentes étapes de la réalisation de ce clip ?

Comme je l’ai mentionné, Σtella est venue me voir avec une histoire et des idées sur les scènes. Tout d’abord, nous avons fait un brainstorming et échangé des idées sur la façon dont l’histoire pourrait se développer et sur les étapes nécessaires dans la narration, mais nous avons également discuté des couleurs et des styles. Certains écrans ont été créés juste après. Au lieu d’un storyboard, j’avais déjà commencé à travailler sur une animatique en utilisant des images et des séquences trouvées ou des ébauches. C’était essentiel pour tester comment les images et les coupes pouvaient fonctionner avec les scènes. J’ai ensuite commencé à travailler sur le premier tiers du film et c’est à ce moment-là que j’ai établi les techniques d’animation. L’illustration et l’animation se sont déroulées en même temps. Le film devait être réalisé dans un délai de 3 mois, nous devions donc prendre des décisions rapides. On a ensuite produit le deuxième tiers de la vidéo, tout en préparant le matériel pour la partie finale. Nous avons gardé quelques touches finales pour la fin, et c’est à ce moment-là que certaines parties de rotoscopie ont été ajoutées (par exemple, lorsque Σtella interprète la chanson).

Pour toi, quel est le meilleur film d’animation de tous les temps ?

Oh, je ne peux pas vous parler du meilleur… mais je peux vous parler de ceux qui m’ont fasciné en revanche. J’apprécie bien sûr les films d’animation classiques de Disney et ensuite les productions du Studio Ghibli, ou les films de Pixar, mais je pense que j’ai surtout été touché par Persepolis, Coco et Fantastic Mr.Fox puisque j’adore le travail de Wes Anderson.

SUPERORGANISM – CRUSHED.ZIP

ANIMATION : AEVA

Salut Dan ! La première question est assez basique mais nécessaire : que fais-tu dans la vie ?

Salut ! L’animation est ma source principale de revenus en ce moment, mais je fais aussi de la musique et du sound design en tant que AEVA.

Qu’est-ce qui t’as amené à l’animation 2D et 3D ?

J’ai appris l’animation traditionnelle dessinée à la main à l’Université, mais avant ça, j’avais toujours été intéressé par l’animation avec des logiciels. J’ai commencé à faire des animations flash quand j’étais adolescent. J’ai toujours aimé la 3D mais je manquais de compétences pour en faire. J’ai appris par moi même comment utiliser le logiciel Cinema 4D d’année en année et je suis très content de pouvoir intégrer ça à ma pratique. Je suis un gros geek, donc j’adore la 3D.

Tu as déjà animé beaucoup de clips musicaux. Comment as-tu évolué dans ta pratique artistique de ta première vidéo à la dernière pour Superorganism ?

Quand j’ai été diplômé, je me focalisais surtout sur la pratique dessinée. J’aime encore travailler de cette façon et me tenir loin de l’ordinateur de temps en temps, mais je mélange les façons de faire maintenant. Par chance, ça marche super bien avec l’esthétique de Superorganism. Ils sont très ouverts à une approche qui s’apparente même au collage, donc c’est une bonne opportunité pour mélanger différents styles et différentes techniques ensemble, et pour pouvoir travailler avec plus de personnes dans le processus de réalisation.

Vous avez d’ailleurs travaillé en équipe pour réaliser ce clip. Peux-tu nous expliquer les rôles de tout le monde et la façon dont vous avez travaillé ensemble ?

J’ai beaucoup travaillé avec Neirin Best récemment, on partage un studio ensemble à Berlin. Pour celle-ci, il était focalisé sur l’animation des personnages cellules, en travaillant plan par plan sur Photoshop. Plus on avançait et plus je voulais étoffer l’univers de la vidéo, et Nicholas Barnes a fait pour ça de super outils et décors en 3D qu’on a pu utiliser pour construire nos scènes et donner cet effet PS1 du début des années 2000. Ils ont tous les deux travaillé également sur la section des cellules mutantes aussi. Wayne McCauslin a animé la séquence zoomée à la fin. C’était génial de pouvoir lui confier cette partie de l’animation comme ça, j’ai pu me concentrer sur l’assemblage du reste de la vidéo. On a eu seulement 4 semaines pour la faire, donc c’était sport.

Quelles étaient les volontés du groupe pour cette vidéo ?

Le groupe était assez clair à propos du concept de la vidéo, les membres visualisaient déjà toute la narration quand ils ont fait appel à moi. Ils étaient plutôt ouverts en terme de style et d’approche, mais assez spécifiques quand sur certains points de l’histoire, ce qui a été utile comme on devait réaliser cette vidéo en peu de temps. Alors que ça parle principalement d’une histoire d’amour, le groupe avait envie qu’il y ait un twist un peu plus dark, avec les cellules qui se dévorent entre elles et qui mutent à la fin.

Peux-tu nous raconter la moralité de cette histoire avec tes mots ?

Je pense que chacun est libre de l’interpréter comme il veut mais je pense que ça parle beaucoup de nos insécurités et de l’égo. Lâcher les choses qui vous empêchent de vous connecter davantage aux autres et à la société en général, pour faire partie de quelque chose de plus grand. Puis au cours de ce voyage… se matérialiser en une nouvelle forme ? et avoir des enfants mutants bien évidemment.

SUPERNOVA – VOL DE NUIT

ANIMATION : JEREMY GDALIA

Salut Jérémy. Peux-tu nous raconter comment cette collaboration avec Supernova est née ?

Paul est un ami de longue date,  nous avons toujours collaboré professionnellement et dans nos fariboles. D’ailleurs, Supernova marche ainsi en s’entourant de proches pour les clips vidéos, les artworks. Nous fonctionnons un peu comme un collectif, une constellation d’artistes et on retrouve certains des membres de Supernova dans mes projets musicaux (Balafre). Cette collaboration a pris forme pendant le confinement. Chaque matin, chacun chez soi, par écrans interposés, nous faisions notre aérobic puis nous prenions un café en imaginant le clip. Cela a rythmé notre quotidien pendant de longs mois. Nous nous disions au revoir avec des « homework » et tout cela prenait forme de jour en jour. C’était un moyen de continuer à travailler malgré une pandémie qui nous retenait chez nous.

Le style d’illustration utilisé dans ce clip a l’air de se distinguer de ton univers habituel emprunté aux mangas, qu’est-ce qui a motivé ce choix ? 

J’ai voulu sortir de ma zone de confort et emprunter un autre genre d’illustration et d’animation. J’ai toujours été un grand admirateur des premières animations américaines des années 20 de style « Rubber hose » comme Felix the cat, Betty Boop et Oswald the Lucky Rabbit pour n’en citer que quelques-uns. J’adore aussi les jeux rétro des années 80 / 90 de type « Scrolling shooters » comme Commando, Metal Slug et Star fox.
Pour ce clip, j’ai eu le désir de mélanger ces deux univers pour en créer un unique.

Quelles étaient les volontés de Supernova pour ce clip ?

Nous étions confinés, Paul à Paris, moi à Londres. Dans cette situation, seule l’animation était permise. L’idée d’un clip qui ressemblerait à un jeu de plateforme 2D vient du fait qu’on a beaucoup fantasmé sur le fait de jouer aux jeux vidéos lors de ces longues journées de solitude. Paul aimait mon univers 80’s, 90’s sans jamais avoir pu trouver de place dans son projet de chansons françaises. Mais avec ce titre, ça marchait bien. L’histoire commence à l’heure bleue en début de soirée et finit avec l’aube. Entre temps, le narrateur a déambulé dans la ville. La métaphore filée d’une escadrille en virée nocturne permettait de s’amuser. L’illustration m’a donné une grande liberté créatrice et j’ai pu accompagner le texte.

Peux-tu nous raconter comment tu l’as construit de A à Z ?

J’ai travaillé en étroite collaboration avec Paul et Linh pour la conception de l’univers et du story board. Avec Linh qui est architecte, on a inventé une ville faite de collages. Une sorte de cadavre exquis où chacun a puisé dans ses archives de voyages. On retrouve un peu de Londres, de Paris mais aussi Naples, Tokyo…C’était agréable de s’y replonger, de changer d’air. Pour les personnages, on a caricaturé nos proches. Chaque animal représente quelqu’un qu’on connait. Dans une période où on ne côtoyait plus personne, invoquer nos amis nous a permis de les retrouver virtuellement. C’était une expérience méta si on veut. Les pigeons et souris représentent les autres, les anonymes. Pour l’ambiance, on voulait communiquer cette réalité anxiogène propre aux grandes ville, où fête et misère se côtoient. Par exemple, les graffitis sur les murs sont des slogans revendicateurs d’une vie plus exaltante.

Puis je me suis concentré sur l’animation et les mouvements des personnages, dessinés image par image pour donner un rendu plus organique, pour perdre en fluidité et avoir cet effet old school. Une fois la création des personnages et des décors finis, j’ai rajouté des effets d’animation sur After Effect pour avoir un rendu un peu plus moderne. Une fois que tous les éléments d’animation furent terminés, j’ai monté le clip sur Adobe Premiere pour l’étalonnage et rajouter un effet VHS au clip. 

Quel est ton rapport avec l’animation ?

C’est lors du confinement que je me suis concentré sur l’animation. J’ai pris le temps de développer, d’explorer de nouvelles techniques de design.
Le fait de donner âme à un dessin 2d m’a toujours fasciné. De plus j’adore l’animation japonaise, plus particulièrement celle des années 80/90 car c’est une animation plutôt simple techniquement, avec peu de mouvement. Cependant l’intention réside dans le ressenti, dans l’émotion et le résultat est toujours très cinématographique.

Sur quels projets travailles-tu en ce moment ? 

En ce moment, je fais les dessins pour des planches de skate d’une marque US, je m’occupe de faire les illustrations pour une marque de saké. L’année dernière, j’ai réalisé tout en animation le clip du rappeur YOURI. Plusieurs collaborations artistiques vont sortir ces prochains mois, je ne peux pas en dire plus pour le moment pour raison légale donc je vous invite à me suivre sur Instagram pour suivre mes actualités et aussi mon projet musical BALAFRE qui sera de retour cette année.

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