Avant de savourer notre messe annuelle tant attendue du 25 au 29 mai, nous nous sommes fendu de quelques questions à l’illustrateur brillant derrière l’identité visuelle de Nuits Sonores 2022, Alexis Jamet.
Après une identité visuelle volontairement en décalage avec son univers signée par l’illustrateur naturaliste Jean Grosson en 2021, notre festival lyonnais préféré a donné les rênes de son identité à un illustrateur qu’on connait bien ici : Alexis Jamet. Avec son grain si caractéristique (qui avait déjà habillé la couverture de Kiblind Sugar Sugar), le parisien a proposé deux affiches antagonistes et complémentaires à la fois au festival. Mettant à l’honneur les métiers de l’ombre indispensables à sa (sur)vie et les symboles inhérents aux lieux où se déroulent Nuits Sonores, l’identité visuelle de l’édition 2022 est aussi belle sur la forme que sur le fond.
Il faut dire qu’en plus d’en imposer visuellement, Nuits Sonores envoient aussi en ce qui concerne la prog. Pour cette 19ème édition, ce sont les maitres et maitresses de cérémonie Helena Hauff, Lala &ce, Dj Harvey et Honey Dijon qui assureront le rôle de programmateur.rices des nuits désormais lovées au Sucre et à la Sucrière. Changement majeur en ce qui concerne le format du festival, les « Days » eux, prendront place, à l’inverse, aux anciennes Usines Fagor Brandt pendant quatre jours, avec des artistes de haut vol comme MC Carol, Yung Singh, Para One, Nu Genea, Lous and the Yakuza, Pelada ou encore les lyonnais LB aka Labat et Saku Sahara.
On a demandé à Alexis Jamet de nous parler des noms qui l’ont interpellé dans cette programmation et évidemment de tout nous raconter de sa collaboration avec Nuits Sonores.
Salut Alexis, peux-tu nous dire ce que t’évoquaient les Nuits Sonores quand on est venu te chercher pour réaliser l’identité visuelle de cette année ?
J’avais déjà entendu parler des Nuits Sonores comme étant un festival populaire lyonnais bien que je n’y ai jamais mis les pieds. Après toute cette période de crise sanitaire, j’étais réjoui de pouvoir travailler de nouveau sur un événement musical.
On retrouve plusieurs symboles dans tes illustrations pour l’édition 2022 des Nuits Sonores, peux-tu nous en parler en détails ?
Pour cette édition, j’ai voulu honorer les différents acteurs qui travaillent sur le festival, notre attention étant concentré sur les artistes. Que ce soit les ingénieurs son et lumière, les bénévoles ou encore les organisateurs. Ces symboles font donc honneur au staff des Nuits Sonores à travers des dessins techniques presque schématiques parfois, qui sont en confrontation avec des fonds moins définis, suggérant des ambiances lumineuses. Ensuite, chacun peut y voir sa propre signification, les yeux par exemple peuvent autant représenter le regard bienveillant des secours et de la sécurité, comme celui du public qui observe les lieux et concerts.
Quelle ont été tes réflexions quant au choix des textures et de la palette de couleurs utilisées pour ces deux dessins ?
On m’a demandé de faire deux affiches distinctes, une pour les jours et une pour les nuits. Les couleurs se sont donc faites en prenant en compte cette contrainte. Avec une affiche aux couleurs douces et paisibles pour la journée, en face d’une version plus obscure et tranchée pour les nuits. Les dessins à la ligne eux, sont faits au normographe et traceur afin de jouer du contraste entre procédé numérique/automatique et manuel. Ce qui peut faire écho à la musique électronique.
Quels sont les artistes de la programmation de cette édition des Nuits Sonores qui te tentent tout particulièrement ?
River Yarra avec qui j’ai eu l’occasion de travailler sur un disque que j’avais particulièrement apprécié avec le label Ville Nouvelle il y a quelques années. J’ai aussi eu l’occasion de voir Glitter à l’hippodrome de Vincennes l’année dernière, ce qu’elle jouait m’a vraiment plu.
Bawrut avec qui j’ai pu travailler aussi l’année dernière. Et puis Palm Trax et Mall Grab, pour rigoler sur de la house.
Lors de notre précédente interview, tu travaillais sur l’identité du festival Magma. Est-ce que le fait d’imaginer tout l’univers graphique qui deviendra indissociable d’un festival est un exercice plus stressant qu’un autre ?
Malheureusement le festival Magma à dû être repoussé plusieurs fois et n’aura toujours pas eu lieu.. Magma était un événement de niche et à plus petite échelle. Les Nuits Sonores visant un plus large public, la réflexion n’est donc pas la même et l’échange avec les organisateurs non plus. Ce sont donc deux bons exemples de projets ou la demande est la même mais pas la finalité. Avec quelque chose de très expérimental d’un côté, et de plus accessible de l’autre. C’est ce genre de contraste qui me plait et évite de me répéter dans ma pratique. Aussi pour les Nuits Sonores je n’ai pas eu à me charger de la partie design graphique contrairement à Magma, j’ai du seulement livrer ces deux illustrations ce qui est donc moins stressant d’une certaine manière.
Le compositeur Matías Enaut s’était inspiré de ton livre Le Bruit des Pétales pour créer un EP. Aimerais-tu faire l’exercice dans le sens inverse et dessiner à partir de musiques ?
J’ai eu l’opportunité de travailler sur plusieurs clips musicaux ou « visualisers » pour le web ou des lives ces dernières années, dont certains pour Matías. C’est finalement plus commun je pense de travailler de cette manière qu’à l’inverse, comme Matías a pu faire pour Le Bruit des Pétales.
Tu t’es déjà attaqué à l’édition, au textile, à l’animation… Quel prochain médium lié à l’illustration aimerais-tu tester ?
Approfondir la VR et la vidéo.
Sur quel projet travailles-tu au moment où tu lis ces questions ?
Je travaille avec le théâtre de l’Avant Seine à Colombes, avec Bloomberg sur une série de podcasts et un vinyle pour Born Bad Records. Mais je suis principalement occupé par la préparation de mon exposition solo qui aura lieu à la galerie Oddity à Paris le 12 mai prochain et ce jusqu’au 2 juin.
