Le Hasard Ludique remet le couvert pour la huitième édition de son Marché de l’illustration impertinente. Les 4 et 5 octobre prochains, le plus grand marché coquin de Paris revient avec une programmation toute dédiée pour explorer les liens entre bouffe et désir. Un programme léché !
Au Hasard Ludique l’été dure toujours un peu plus longtemps qu’ailleurs… Et pour cause : inmanquable de la rentrée, le Marché de l’illustration impertinente revient pour une nouvelle édition toujours plus audacieuse, à donner chaud ! Car ici, on célèbre les images qui bousculent, interrogent et séduisent, celles qui explorent le désir sous toutes ses formes, sans détour ni tabou. Pendant tout un week-end, une trentaine d’illustrateur·ices viendront partager leurs créations, accompagnés d’ateliers pour expérimenter, discuter, apprendre et s’amuser. Dessins érotiques, performances, conversations décomplexées, concerts et découvertes inattendues : le Marché promet une immersion totale dans un imaginaire aussi joyeux qu’impertinent. Ne prenez pas peur, on se décomplexe un grand coup, et on régale ses yeux de créations illustrées !
Cette année, l’audace de l’édition est incarnée par Anna Tébo, qui signe une affiche au traits ronds, aux personnages loufoques qui vous invitent – si vous le souhaitez – à plonger dans le sensuel le temps d’un week-end. Graphiste-illustratrice, Anna Tébo a accepté de nous parler un peu plus de son travail.
Bonjour Anna, tu signes l’affiche de la 8e édition du Marché de l’illustration impertinente, peux-tu nous la présenter ?
Salut Kiblind,
J’ai créé pour cette édition une affiche qui, quand on la regarde, nous regarde aussi. J’avais envie de bousculer les représentations du sensuel et proposer une image loufoquement érotique. C’est une ode à tout ce qui est bizarre — et par extension Queer. Quand on la regarde, on ne sait pas trop si on vient de les surprendre en pleine orgie ou si leur regard nous invite à participer. Quoi qu’il en soit, on se retrouve d’office voyeureuse.
Et puisque cette 8e édition lie l’impertinence à la nourriture, j’ai fait une sélection des fruits & légumes les plus juteux et gluants pour l’occasion.
Tu aimes « patamodéliser », peux-tu nous en dire plus sur cette technique, ce processus ?
J’ai trouvé ce mot pour décrire ma manière de travailler la 3D. Je crée des sculptures bizarres, souvent disproportionnées, pas vraiment lisses avec une texture qui imite celle de la pâte à modeler. La 3D a tendance à tout lisser, à rendre parfait ce qu’on produit. Je cherche justement l’inverse, garder l’imperfection du geste, la trace de la main.
Je commence toujours par des croquis au crayon – c’est mon moment préféré, je cherche mes compositions. Ensuite j’essaie de retranscrire le plus fidèlement possible mes dessins en 3D. Puis j’applique une texture pâte à modeler qui est une texture faite maison, j’ai trempé mes doigts dans l’encre noire, laissé mes empreintes sur une feuille blanche puis scanné le tout. Le noir s’imprime dans la texture et le blanc en ressort. C’était une manière un peu tordue de faire en sorte que mes doigts « touchent » ce que je modélise.
As-tu suivi le même processus pour réaliser l’affiche du Marché de l’illu impertinente ?
Presque ! J’avais tout de suite cette image du Déjeuner sur l’herbe qui m’apparaissait, elle m’entêtais alors je suis allée la redécouvrir. J’ai comprit pourquoi, elle avait choqué, jugée impertinente non pas seulement pour la nudité ou ses défauts techniques mais aussi pour le regard dirigé vers nous. J’ai adoré cette raison, et c’est donc cette référence qui m’a guidé pour la suite. Le décor était planté, un parterre d’herbe bien verte, des perspectives irréalistes et des regards dirigés vers nous.
Je suis allée fouiller dans d’autres peintures, du téton pincé de Gabrielle d’Estrée aux dizaines de fesses rebondies de Frédéric Bazille, et j’ai commencé par faire des collages de ces tableaux, puis j’aimais le contraste des anciennes peintures réinterprétées en 3D. J’ai commencé un croquis, joué avec la compo et les perspectives de telle façon à ce que tous les personnages soient reliés. Puis je cherchais comment appuyer leur regard. Il y a la fameuse Mona Lisa qui ne nous quitte pas du regard, mais il y a aussi ces gomettes yeux qui, je ne sais pas comment, ont toujours l’air de nous fixer. Ça créait le décalage et le bizarre que je cherchais.
Ensuite pour les couleurs, je les trouve souvent à la toute fin du projet, au même moment où je place les lumières et textures. Je voulais quelque chose de chaud et mouillé, qui soulignerait bien le sujet de l’affiche. D’un rouge vif au violet avec toutes leurs nuances, une bichromie souvent associée à l’érotisme, sur des textures parfois brillantes/humides, entourées d’une eau très trouble.
J’ai voulu représenter l’impertinence et répondre au sujet par des biais qui me touchent et sont présents dans le reste de mon travail, j’adore les mains et ce qu’elles peuvent dire ou trahir selon leur position et comment elles s’emparent des choses.
Qu’est-ce que tu aimerais que l’illustration puisse dire dans les prochaines années ?
Ce qu’elle dit déjà, continuer à déconstruire et réinventer les codes du sensuel et du beau, que l’on puisse voir des représentations multiples du genre, des corps de toutes les formes, de toutes les couleurs et pourquoi pas en 3D aussi !
Et puis, en tant que femme 3Diste, je trouve important de rendre visible cette pratique. Il y a des créatrices incroyables qui explorent cet outil et que j’admire énormément comme Karachnikov, Ines Alpha, Pauline Sesniac, Sarah Ann Banks, Nueps, Aleksandra Bokova, Steph Ramplin, et encore pleins d’autres. Elles prouvent que la 3D n’est pas qu’un outil technique mais un vrai langage artistique, capable de poésie, d’intimité et de réinvention des imaginaires.
Pour finir, quels sont tes inmanquables dans la programmation cette année ?
Il y a Justine Thevenin, j’adore son travail, comment iel le communique avec beaucoup d’honnêteté et de douceur. Et sinon j’ai hâte de découvrir le travail de tout le monde, voir toutes les manières de représenter l’érotisme, d’assister au show et au dîner évidemment ! Beaucoup de choses pour se régaler !
Retrouvez toute la programmation du
Marché de l’illustration impertinente 2025 ici
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