À partir du 24 avril, Strasbourg accueille à nouveau les Rencontres de l’illustration. Évènement désormais incontournable, la ville de Strasbourg peut également se targuer d’un honneur supplémentaire, celui d’être la première ville désignée Capitale Mondiale du Livre par l’UNESCO pour l’année 2024. Rencontre avec Madeline Dupuy Belmedjahed, coordinatrice.
La 9e édition des Rencontres de l’illustration arrive sur les chapeaux de roues, du 24 avril au 19 mai 2024. Et ce sont bien 25 jours qui seront nécessaires pour profiter entièrement de cette programmation riche et éclectique, mettant à l’honneur ce que l’illustration fait de mieux. Des expositions, des visites, des ateliers et des animations proposées par les Médiathèques de la Ville et de l’Eurométropole, les Musées, le 5e Lieu, la HEAR, Central Vapeur et les Éditions 2024, voilà de quoi en prendre plein la vue.
Rajoutez à cela que Strasbourg est élue Capitale Mondiale du Livre par l’UNESCO, et vous obtenez tous les ingrédients pour promettre une édition haute en couleurs et riche en émotions. Strasbourg voit grand et ça n’est pas Madeline Dupuy Belmedjahed – la coordinatrice de cet événement à ne pas louper – qui nous dira le contraire. Mieux, elle a pris le temps de nous expliquer davantage les enjeux de cette 9e édition, de quoi donner envie de faire un tour du côté de la capitale européenne.
Cette année, les Rencontres de l’illustration s’inscrivent dans la programmation de Strasbourg Capitale mondiale du livre UNESCO 2024, qu’est-ce-que cela apporte à cette neuvième édition ?
Strasbourg a été désignée Capitale Mondiale du Livre par l’UNESCO pour l’année 2024. Une programmation exceptionnelle va ainsi faire vibrer Strasbourg sur les questions du livre, de l’illustration, des savoirs, plus largement de la culture, et ce du 23 avril 2024 au 22 avril 2025.
C’est dans cette mise en lumière internationale incroyable que va s’installer cette 9e édition des Rencontres de l’illustration, dont le lancement se fera le 24 avril prochain. Ces Rencontres, qui se dérouleront jusqu’au 19 mai 2024, seront le premier temps fort de programmation de cette année de labellisation. Une formidable occasion de renforcer la cohésion et l’engagement des partenaires impliqués dans les Rencontres de l’illustration, dans une programmation particulièrement ambitieuse qui témoignera au monde de la place singulière de Strasbourg en tant que ville créative et poétique.
Comment ces Rencontres de l’illustration vont-elles s’emparer de cette position internationale ?
La position transfrontalière de Strasbourg, capitale européenne, dans ce carrefour tri-rhénan, la présence des institutions européennes, des universités et surtout la diversité culturelle de la ville font que Strasbourg a toujours eu le regard et le cœur tournés vers l’international.
Ce dialogue avec les autres cultures et formes de l’illustration a ainsi toujours été un objectif des Rencontres de l’illustration, depuis les prémices. Portées par la Ville de Strasbourg, celles-ci fédèrent les treize médiathèques de la Ville et de l’Eurométropole, trois musées de la Ville, la Haute école des arts du Rhin et l’association Central Vapeur. Les Rencontres de l’illustration s’équilibrent entre la célébration de l’héritage de Strasbourg en matière d’illustration, avec les grandes figures tutélaires telles que Gutenberg, Gustave Doré, Tomi Ungerer ou encore Blutch, et le super dynamisme de la création contemporaine impulsé par les créateurs et créatrices installé·es sur notre territoire, pour la grand majorité formé·es à la Haute école des arts du Rhin ou encore par les Éditions 2024. Tous ces partenaires, pour les raisons évoquées plus haut, ont l’habitude de penser le rayonnement transfrontalier, européen et international de leurs actions.
Plus spécifiquement dans la programmation de cette année, on retrouve Gustave Doré, dont l’influence jusqu’à aujourd’hui est indéniable, y compris à l’international. Autant pour son engagement sur la reconnaissance statutaire et économique des illustrateurs et des illustratrices que pour la puissance évocatrice de ses gravures. Et – petit instant pop culture – les yeux connaisseurs auront déjà reconnu ses gravures épinglées aux murs de la chambre de Fétide dans le film « La Famille Addams » du réalisateur américain Barry Sonnenfeld en 1992. Artiste culte donc, à plus d’un titre.
Le Musée Tomi Ungerer présente quant à lui une rétrospective sous forme d’introspection, Une rétrospection, de l’autrice québécoise Julie Doucet, Grand prix du Festival international de bande-dessinée d’Angoulême en 2022.
Le festival de l’association Central Vapeur nous transporte vers la Méditerranée avec les trois artistes libanaises Raphaelle Macaron, Karen Keyrouz et Nour Hifaoui Fakhoury, toutes membres du collectif de bande-dessinée contemporaine arabe Samandal, ainsi qu’avec l’illustrateur espagnol Jesús Cisneros.
Et puis l’Ecosse avec Tom Gauld dont la Revanche des bibliothécaires, est éditée à Strasbourg, par les Éditions 2024.
Strasbourg, capitale européenne, Capitale Mondiale du Livre et plus que jamais ville carrefour des formes et des idées.
Que met en avant la programmation de cette année ?
Tout ce qui fait l’incroyable identité et richesse de Strasbourg autour du livre !
La programmation pensée par l’ensemble des partenaires et des artistes va joyeusement nous propulser dans l’éclat de la galaxie Illustration, comme le souligne l’affiche réalisée par Raphaelle Macaron pour cette occasion.
Ce qui va se traduire par une véritable réflexion autour de l’image, de son apparition, de son support et de ses enjeux.
L’exploration de la constellation Gustave Doré à la Galerie Heitz permettra de prendre la mesure de l’influence et de l’héritage de l’artiste à travers les siècles.
Au Musée Tomi Ungerer, ce sont plutôt les possibilités politiques et esthétiques de l’illustration qui seront interrogées par Julie Doucet.
Fanette Mellier, Betty Bone ou encore Jérémie Fischer aux Médiathèques ou les éditions L’Articho à la Haute école des arts du Rhin vont transformer la fabrique du livre et des images en un laboratoire expérimental à la fois ludique et total.
Les expositions des Rhubarbus au 5e Lieu ou des Éditions 2024 dans l’espace public mettront en orbite les illustrations au-delà de leur support et avec elles, les questionnements sur la définition de l’illustration.
Raphaëlle Macaron, Karen Keyrouz et Nour Hifaoui ou encore Jesús Cisneros nous permettront d’aborder d’autres foyers très riches de création, tout en abordant les notions de liberté d’expression.
La jeune création, notamment strasbourgeoise, sera également mise en avant, au sein du festival Central Vapeur.
Bref, tout ce qui fait qu’à Strasbourg l’illustration est à son apogée et comment depuis notre ville, celle-ci rayonne, s’enrichit et se réinvente.
L’affiche de cette édition est réalisée par l’illustratrice libanaise Raphaelle Macaron, comment a-t-elle été pensée ?
Raphaelle Macaron a été accueillie à Strasbourg à l’automne dernier, pour une résidence d’un mois à Central Vapeur, qui avait déjà arrêté le thème de son festival autour de la Méditerranée. Au vu de son travail, de sa présence, de ses engagements, l’idée et l’envie de lui proposer la réalisation de l’affiche des Rencontres de l’illustration est vite apparue. Surtout que Raphaelle s’était déjà vue proposer la réalisation de l’affiche du festival Central Vapeur. On se retrouvait donc avec la possibilité d’avoir deux affiches qui s’articulent et se répondent.
Raphaelle, pour l’affiche des Rencontres de l’illustration, propose ce voyage onirique, cette propulsion dans un univers mi-science-fiction, mi-coucher de soleil, avec quelque chose de serein et de légèrement étrange également. Très cinématographique aussi. Ce côté nuit étoilée est également un clin d’œil à l’identité graphique de Strasbourg Capitale mondiale du livre, avec ces étoiles brillantes, en feu d’artifice.
Ce qui nous a tout de suite interpellé dans le travail de Raphaelle, c’est l’importance de la typographie, qui se retrouve complètement intégrée au dessin lui-même, presque indissociable. L’écriture, le dessin de l’écriture, le dessein du dessin, la capacité d’élévation et la puissance émancipatrice de celui-ci : Raphaelle réussit à évoquer les valeurs que nous défendons, symboliquement, avec finesse et intelligence. Grand merci à elle. L’affiche qu’elle a réalisée pour Central Vapeur pourrait être vue comme le pendant diurne, avec la Méditerranée en toile de fond, ce grand ciel qui se déploie, les rochers, le regard perçant et interrogateur d’une jeune fille au premier plan. Une réflexion sur la Méditerranée, entre souvenirs joyeux d’enfance et évocation desdrames qui s’y jouent actuellement.
De nombreuses expositions sont prévues, dans de nombreux lieux de la ville, quelles sont celles à ne pas manquer selon vous ?
Il ne faut en manquer aucune. Elles ont toutes leur importance. Elles permettent à toutes et tous, de tous âges, curieux, amateurs ou fins connaisseurs, de vivre une expérience de l’illustration. Ces Rencontres proposent autant des points de vue plus scientifiques, patrimoniaux et politiques de l’illustration, que des expositions pensées pour les familles et le jeune public, très vives et colorées. Le travail mené sur les lieux de monstration permet également s’adresser au plus grand nombre, dans notre souci permanent d’ouverture et de développement des publics.
En plus des musées, des médiathèques et des autre salles d’exposition, l’espace public est réellement investi par les artistes. Les créations se retrouvent ainsi au plus près de toutes et tous, dans leur quotidien, sur leur trajet pour aller à l’école, au travail, etc. Aussi, ces Rencontres 2024 dureront un peu plus longtemps que d’habitude, un mois en tout, ce qui laissera le temps à chacun et chacune de découvrir toutes les facettes de cette programmation, qu’il est possible de retrouver sur notre site.
En parallèle il sera également possible de participer à différents évènements : des ateliers, des rencontres, des spectacles jeunes publics ou encore la parade des Micronations de Central Vapeur. Pouvez-vous nous en dire davantage ?
Ce qui est chouette avec les Rencontres de l’illustration, c’est qu’il ne s’agit pas que d’expositions. L’idée est vraiment de montrer que l’illustration est partout, accessible, qu’elle déborde, que l’on peut s’en saisir par plusieurs bouts. Que la création est aussi un engagement et une revendication, comme en témoigne la parade des Micronations de Central vapeur, qui porte haut les univers de chaque illustrateur.ice qui y participe. Un rappel au monde que les créateurs et créatrices existent (et sont essentiel·es).
Faire venir les publics dans les expositions, c’est bien. Faire se rencontrer publics et univers artistiques, c’est super. Faire se rencontrer artistes et publics dans un contact plus direct et sensible lors de visites, de temps d’échanges, d’ateliers ou de spectacles, c’est précieux et c’est là est aussi tout l’intérêt des Rencontres de l’illustration. Et puis il y a également des temps plus informels et carrément festifs, avec notamment avec la soirée futuriste des éditions 2024 en présence des auteurs et autrices de leur catalogue ou le finissage de l’exposition du collectif Comme des garces à l’Orée 85. Entre autres !
L’année prochaine sera une édition importante, les 10 ans des Rencontres de l’illustration, vous les imaginez déjà ?
Je dirais même plus, nous travaillons déjà dessus. Une thématique a déjà été établie, qui viendra éprouver les limites de l’illustration. Et cette 10e édition viendra presque en clôture de l’année Strasbourg Capitale Mondiale du Livre UNESCO. Alors nous allons encore vous réserver de belles surprise avec une programmation à la hauteur de ces 10 ans.
Vous êtes toutes et tous invité.es à notre fête d’anniversaire qui se déroulera du 20 mars au 6 avril 2024.
