Les Gens du Mag : Ken Sausage

Amoureux du bizarre, Ken Sausage n’atteint jamais la satiété lorsqu’il s’agit de dessiner des monstres. C’est donc tout naturellement que nous lui avons proposé d’illustrer une page de notre numéro « Monstres ». On en profite pour lui poser quelques questions. 

Les dessins académiques ? Très peu pour Ken Sausage. Celui qui avoue ne s’être jamais intéressé aux leçons théoriques à trouver grâce à la figure du monstre un exutoire parfait. Permettant de fuir la réalité, ses créatures folkloriques lui donnent l’occasion de s’exprimer à sa guise et sans aucunes contraintes. Particulièrement intéressé par les visages, l’illustrateur espagnol prend plaisir à créer des personnages hybrides aux oreilles XXL et aux yeux globuleux, qu’il décrit lui même comme étant à la fois mignons et laids.

Pour notre numéro « Monstres », nous avons demandé à l’artiste résidant à Barcelone de créer une illustration sur le thème « Mais qui sont les monstres ? ». Ken Sausage nous emmène, avec elle, vers son univers étrange grâce à un autoportrait singulier et hybride. On a sauté sur cette occasion pour lui poser quelques questions sur ses projets et sur ce qui l’inspire.

« Mais qui sont les monstres ? » – Création originale de Ken Sausage pour Kiblind « Monstres »

Salut Ken Sausage. Pour notre magazine Kiblind « Monstres », tu as choisi de dessiner un personnage aux milles et une têtes. Peux-tu nous en parler plus en détails ?

Je suis un peu obsédé par les visages, je vois des visages partout, comme si j’habitais la maison Bélmez. Alors j’ai pensé que ce serait drôle de me dessiner et de faire que chaque partie de mon corps soit un « être humain » à part entière. En les accolant toutes ensemble, cela forme un personnage qui se déplace de façon synchronisé. Le premier titre auquel j’ai pensé pour cette illustration était « BEE YOURSELF », par rapport aux petites abeilles bleues apparaissent en arrière-plan, elles sont donc supposées être elles-même. Au final, j’ai choisi de l’appeler « MONSTER HIGH ». Tirez-en vos propres conclusions…

Bambi y Lolo – Illustration personnelle
Taller-Toys are Us, atelier pour enfants animé par Ken Sausage à Grafcomic

La figure du monstre est utilisée depuis toujours. Il est celui que l’on montre mais il peut aussi être celui qui révèle nos propres défauts. Quelle est son utilité selon toi ? 

Je pense que chacun a son propre équilibre d’énergie positive/négative. J’ai l’impression que la figure du monstre est une projection des pensées les plus sombres qu’une personne puisse avoir. En fait, je pense que c’est une évasion de la réalité, un espace pour la pensée inconsciente et irrationnelle, qui dans sa bonne dose peut être très inspirante. Il y a un titre d’oeuvre de Goya qui dit Le sommeil de la raison engendre des monstres (gravure, Francisco de Goya, 1797) et j’aime beaucoup ce point de vue.

Graffiti Farmer – Illustration personnelle
IA Headache – Illustration personnelle

Le monstre est une figure omniprésente dans tes dessins. Le fait de dessiner des personnages au physique fantastique est-il un moyen pour toi de te débarasser des contraintes stylistiques et de certains devoirs de contextualisation ? 

Je pense que oui ! Je n’ai jamais été intéressé par l’apprentissage du dessin anatomique ou réaliste de manière académique. De plus, je ne suis pas un grand fan des contraintes stylistiques, je suis plutôt un amoureux du bizarre. Je suis aussi obsédé par les choses mignonnes et tendres, alors j’essaie de donner à mes dessins un sentiment d’étrangeté et de laideur équilibré avec ce sens mignon et tendre. De cette façon, il m’est beaucoup plus facile de leur donner leur propre personnalité car ce sont les personnages dont j’ai besoin pour exprimer mes idées. Je suppose que je me sens comme un monstre mignon à la fin.

New age totems – Illustration personnelle
Neohippies – Illustration personnelle

Où puises t’on de l’inspiration pour créer de nouveaux monstres de toutes pièces lorsque l’on en a déjà créé des dizaines / centaines ? 

Partout ! Je prends généralement des photos de tout ce qui ressemble à un visage, parfois je m’inspire aussi en promenant mon chien en ville. Mais, je suis également très intéressé par les créatures folkloriques et les monstres du monde entier. Dernièrement, j’ai regardé beaucoup d’images culinaires qui essayaient de représenter quelque chose de très éloigné de la nourriture et c’est aussi une inspiration vraiment cool.

Cañamo – Illustration personnelle
Staying Abstract Squared – Illustration personnelle

Penses-tu venir à bout de ce sujet un jour ? 

JAMAIS !

Pretty Boy – Illustration personnelle

Peux-tu nous citer 3 projets qui ont été marquants pour toi et nous dire pourquoi ?

Mountain Dew – C’était mon premier projet international en tant que designer, et c’était un gros défi car nous devions créer 51 spots animés, une animation principale, plus une pour chaque état des USA. Complètement fou. Cela m’a apporté beaucoup d’expérience dans le domaine de l’animation et de la publicité, j’ai aussi travaillé avec des gens formidables comme Andy Baker, Lucia Davis et tous les gens de HelloHornet, avec qui j’ai fini par continuer à travailler. C’était donc un projet très important pour moi.

Mountain Dew

Tony Delfino – Collaboration récente que j’ai faite avec Tony Delfino, une marque textile mexicaine qui collabore avec différents artistes à travers le monde. Être invité à collaborer avec la marque, c’était fou. J’ai également pu collaborer avec l’un de mes artistes préférés au monde, Smithe. Je pourrais dire que c’est un rêve accompli.

Collaboration avec la marque Tony Delfino

Forn de Calç – Je fais aussi des bandes dessinées, j’ai 4 livres publiés, mais cette histoire spéciale (8 pages) que j’ai faite pour l’anthologie catalane « Forn de Calç » publiée par Extinció Edicions est l’une de mes préférées de tous les temps. Cette publication a également remporté le prix Angoulême « BD Alternative » 2023, ce qui rend ce projet encore plus important pour moi.

Forn de Calç
Forn de Calç

KEN SAUSAGE // KIBLIND MONSTRES

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