Le festival Marathon! nous ravit chaque année par sa propension à mélanger musique contemporaine et musique actuelle pour que ces vains mots disparaissent en fumée. Cette ligne éditoriale plutôt pas dégueu se double d’un course sans arrêt entre les différents artistes et qui donne son nom à l’entreprise.
Marathon! 2016 nous claque une programmation brûlante avec trois jours de musique entre Gaîté Lyrique, Théâtre de Vanves et Le Badaboum, la présence de Pantha du Prince, Mad Rey ou Ben Vedren et les créations de Flavien Berger et Romain Turzi.
Comme nous ne voudrions surtout pas trahir par nos mots l’essence du bijou parisien, on a laissé Laurent Jacquier, le fondateur de ce bastringue.
Kiblind : Pouvez-vous nous présenter le festival ?
Laurent Jacquier : « Le festival « Marathon! », dont c’est la troisième édition en 2016, a pour ambition de présenter sur des mêmes soirées des genres musicaux (notamment musique électronique et musique répétitive), qui ont des connivences artistiques entre eux, mais qui ne se rencontrent que trop peu d’habitude, devant un même public. Je trouve que les festivals restent encore aujourd’hui très classés par genres musicaux, développant ainsi un public de spécialiste, alors que plein de gens, comme moi, adorent écouter à la fois du Steve Reich et un artiste comme Pantha du Prince, ou encore le groupe que je produis par ailleurs « Cabaret Contemporain », un groupe électro-acoustique, où les instruments produisent des sonorités électroniques.
Kiblind : Pourquoi avoir choisi cette forme du « Marathon », de la musique sans arrêt ?
Laurent Jacquier : Pour avoir un esprit de fête, pour garder une énergie liée à la musique – je trouve que souvent, ça retombe trop lors des changements de plateaux. Cela permet aussi de pouvoir présenter des plus petites formes artistiques, qui ne trouveraient pas leur place sur le grand plateau.
Kiblind : Pouvez-vous nous détailler la programmation ?
Laurent Jacquier : Cette année, lors de la soirée à la Gaîté Lyrique, on accueillera un live solo de Pantha du Prince, une création spéciale de Flavien Berger autour de la musique minimaliste (on avait rencontré Flavien à la Gaîté l’année dernière lors de la venue de Terry Riley, et on s’était dit que ce serait super de l’inviter à cette occasion), une création pour 10 musiciens de Turzi, répartis dans les coursives de la Gaité, une magnifique pièce de Steve Reich pour 3 pianos électriques, et enfin le tout dernier set du « Cabaret Contemporain », à l’occasion de la sortie de son dernier album. Pas mal de projets exclusifs pour le festival du coup. Entre ces cinq grands plateaux, on accueillera un solo de cornemuse délirant !, et deux pièces de Steve Reich pour claves. On pourra découvrir le set du Cabaret Contemporain entre le set de Flavien et le live solo de Pantha du Prince, ça va être chaud ! Sur la soirée en club au Badaboum le 25 novembre (de 23h à 06h), on accueillera un set de Mad Rey et de Soulphiction, et un projet original autour de « la Machina », création du pianiste du Cabaret Contemporain, Fabrizio Rat : un projet autour d’un piano préparé et d’une boîte à rythme ! Enfin, la soirée au Théâtre de Vanves le 26 novembre prochain présentera un live de Ben Vedren, signé chez Concrete, et une pièce de Steve Reich. Le public pourra danser sur la piste, au milieu des artistes.
Kiblind : Comment se fait le choix des artistes ? Quels sont les envies qui vous guident ?
Laurent Jacquier : L’idée est d’inviter des artistes que l’on sent disposés à avoir l’ouverture d’esprit musical, qui est à l’origine de l’identité du festival. Qui aiment à la fois la musique électronique, mais pas que ! Par exemple, l’année dernière, on avait invité le projet « Hello Terry Riley » de James Holden et Camillo Tirado – on adore Holden, mais le but n’était pas de l’inviter pour qu’il donne à entendre son projet « The Inheritors » qu’il tournait, mais bien un projet spécifique. De même qu’en 2014, on a invité Carl Craig pour son projet autour des « Modulars », et non pas un set typique. Rebotini est venu l’année dernière pour présenter son projet « Frontières » avec Zanezi, directeur du Grm. Et puis bien sur, l’envie toujours de programmer « Cabaret Contemporain », le groupe dont je m’occupe par ailleurs, et dont j’aime toujours encore plus la musique. L’envie de travailler aussi avec Links, avec qui je tourne pas mal de pièces de Steve Reich (« Music for 18 musicians » avec des danseurs amateurs notamment).
Kiblind : Quelle importance pour vous, d’inclure des créations ? Est-ce le rôle d’un festival selon vous ?
Laurent Jacquier : Même si le festival ne demande surtout pas aux artistes d’imaginer des rapprochements au sein de leur live entre les genres musicaux, je trouve ça bien qu’un festival puisse présenter des projets originaux. Pour nous, du coup, cela va être guidé par l’envie de faire entendre des projets qui ne tournent pas souvent en France, précisément parce qu’ils ne trouvent pas les bonnes « entrées » en terme de diffusion, ou alors de suggérer à des artistes de pouvoir créer un set, comme c’est le cas avec Flavien Berger cette édition.
Kiblind : Vous aimez naviguer sur ce charmant et étroit fil entre musique savante et musique populaire. Pourquoi ce choix ?
Laurent Jacquier : Parce que j’aime les deux ! mais je récuse complètement ces termes de musique « populaire » et « savante » – cela ne veut rien dire ! on peut pas dire que Pantha du Prince est « populaire », il s’adresse autant à une niche de public que la musique de Steve Reich (peut-être plus en fait). Mais c’est surtout que j’ai envie de faire entendre la musique d’un Reich, d’un Pierre Henry (création l’année dernière) ou encore de Terry Riley (en 2014) dans des lieux plus cools, où le public peut boire une bière, debout, en dansant, que les lieux où cette même musique est d’habitude donnée à entendre. Cela permet aussi de faire entendre cette musique à un public jeune, qui n’irait jamais écouter cette musique dans des lieux où on est assis, et surtout où il n’y a que cette musique qui est donnée à entendre.
Kiblind : Quelles sont les spécificités de cette nouvelle édition par rapport aux précédentes ?
Laurent Jacquier : Cette nouvelle édition s’inscrit vraiment dans la continuité des éditions précédentes, en privilégiant des musiques électroniques francs-tireuses, et des pièces des minimalistes américains. Une des originalités de cette édition est de présenter une soirée en format club, au Badaboum.
CI-JOINT UNE SÉLECTION DU CHEF PARMI LA PROG :