Il y a, dans les dessins de Johanne Roten, une certaine idée de l’élégance. De celle qui décolle les strass, époussette les paillettes et vient, sans artifice et sans crier gare, nous épater. Car ce qui domine les travaux de la Lausannoise, c’est la force tranquille qui s’en dégage comme une main sur l’épaule qui nous invite à aller plus loin. Ainsi, dans son illustration pour le numéro « Là-Bas » de Kiblind sommes nous doucement poussé.es à traverser le miroir.
Pour notre dernier numéro, vous avez dessiné un miroir comme une porte ouverte vers l’inconnu. Est-ce que, quand vous démarrez un dessin, vous avez l’impression de vous jeter dans l’inconnu ?
Tout dépend s’il y a un.e mandataire derrière le dessin à réaliser ou non. Lorsque c’est une commande, j’ai plusieurs informations qui me sont données en amont, je ne pars donc pas avec « rien », et les idées sont plutôt claires, avant même de m’y mettre. Par contre, quand je dessine pour moi, souvent la direction que prend le dessin se précise au fur et à mesure, et c’est un peu magique à chaque fois.
Vous proposez un dessin minimal pour représenter, dans certains dessins, des paysages puissants, des architectures imposantes. Est-ce que vous travaillez particulièrement ce contraste entre la finesse du trait et le monumental du sujet ?
Je crois que l’esthétique minimale dans mes dessins est plutôt une manière de rendre le sujet propre à chacun.e, une façon de normer les éléments, pour les rendre plus accessibles.
Votre dessin de peu de traits et de couleurs unies parvient à imposer le silence et ouvre la voie à la contemplation. Est-ce qu’il y a une volonté consciente de laissez l’esprit du regardeur divaguer devant votre travail ?
Oui, j’aime l’idée que la personne en face du dessin puisse s’évader et laisser libre cours à sa propre imagination, se raconter sa propre histoire.
Vous utilisez beaucoup la risographie pour imprimer vos travaux. Pourquoi ce choix et celui-ci affecte-t-il votre façon de dessiner ?
Gros coup de cœur pour la risographie pour plusieurs raisons. C’est une technique d’impression plus écologique, les couleurs sont belles-belles-belles et le résultat a ce petit côté « imparfait » qui donne du charme et crée la surprise à chaque tirage.
Vous êtes aussi graphiste. Avez-vous l’impression que vos deux activités se nourrissent l’une, l’autre et si oui de quelle manière ?
Totalement. Je suis graphiste depuis 10 ans et l’illustration s’invite souvent dans mes projets. Le dessin vient compléter le travail de mise en page et apporte un petit plus. C’est ce que j’aime dans ce métier, toutes ces facettes et possibilités qui font qu’on ne s’ennuie jamais.
Pourriez-vous nous parler de 3 projets qui vous tiennent particulièrement à cœur ?
Il y a quelques mois j’ai réalisé une illustration pour le shop Music Sounds Better With Books, un « books and records store » tenu par mon compagnon et deux amis. Le dessin a été sérigraphié sur des tote bags et décliné en stickers. C’est toujours un plaisir de voir un visuel porté, collé – s’animer!
Sinon, je viens de terminer des illustrations pour le Festival de la cité, un festival d’arts vivants et de musique qui a lieu dans le centre-ville de Lausanne, là où je vis actuellement. C’est un super événement au milieu de l’été et de pouvoir y participer et y apporter ma touche m’a beaucoup plu.
Enfin, j’ai en tête depuis longtemps des idées de dessins portant sur le Valais en Suisse, la région d’où je suis originaire. Mais comme c’est WIP (Work In Progress), je n’ai pas encore de visuels à vous montrer 😉