C’est avec son sujet de prédilection – une histoire d’amour et d’acceptation bercée dans une tendre légèreté – que Clara Hervé avait su conquérir le coeur du jury lors de la précédente édition du concours Jeunes Talents du festival BD d’Angoulême. À quelques semaines de l’édition 2024, nous avons pu discuter avec elle pour la découvrir davantage.
Récompense incontournable du festival d’Angoulême, le prix Jeunes Talents met chaque année en lumière une sélection d’illustrateur.ices n’ayant encore jamais été publié.es professionnellement. L’année dernière, en janvier 2023, Clara Hervé y a participé car elle remplissait tous les critères : beaucoup de talent et trois années devant elle avant d’avoir 27 ans.
Armée de ses trois planches colorées, l’illustratrice strasbourgeoise diplômée de la Haute École des Arts du Rhin à revisité l’histoire du chat et de la souris. Avec ses personnages attachants et son ton résolument bienveillant, elle a mis en dessin une histoire au discours actuel. Et elle a gagné.
Hello Clara, tu as terminé première lauréate du concours Jeunes Talents 2023 lors du festival BD d’Angoulême, encore bravo ! Mais alors, qu’est ce que cela t’as apporté au cours de l’année qui vient de s’écouler ?
Merci ! Déjà ça m’as procuré beaucoup de joie et d’émotion car mon travail était sélectionné à coté de celui de Margot Farnoux et Anto Metzger était dans le jury. Ce sont des autrices que j’admire et dont le travail me touche beaucoup. C’est un peu dur de se rendre compte ce que concrètement apporte le prix, mais de la visibilité je pense. En tout cas cette année, j’ai eu des commandes d’illustrations pour la presse et on m’as proposé de faire un livre… Alors c’est chouette !
Peux-tu nous parler de l’histoire qui t’as valu ce prix ?
C’est l’histoire d’une souris qui tombe amoureuse d’un chat. Mais premier problème : elle ne sait même pas ce que c’est, l’amour. Normal, les souris ne tombent pas amoureuses. Enfin d’habitude. Deuxième problème : les chats et les souris ne sont pas censés traîner ensemble. Heureusement, ça va bien se finir pour eux deux.
Quel est le message que tu souhaitais faire passer et pour qui ?
Je n’avais pas trop pensé ma BD en terme de message, j’avais surtout envie de dessiner une souris et un chat. J’aimais bien aussi que le beau et «grand» sentiment d’amour côtoie les croûtes de fromages et les cartons de pizzas. Ça me faisait rigoler. En la relisant, je me rends compte que c’est un histoire très douce. Et je me dis qu’on en a besoin de douceur en ce moment.
Aujourd’hui je ne suis plus vraiment dans le même état d’esprit. Les guerres, les violences policières, notre gouvernement, l’état de la planète… Je crois que si j’avais fait une BD cette année, j’aurais eu du mal à la faire aussi légère.
Tu avais déjà présenté ton travail au festival d’Angoulême en 2022 dans la même catégorie, et ton histoire parlait déjà d’amour difficile à avouer. C’est un thème de prédilection ou le simple hasard ?
Oui c’est vrai. C’est un thème qui revient souvent. Pardon d’être un peu cucul, mais j’ai l’impression que c’est le plus important. Les amis, les amoureux, les amoureuses, c’est tellement agréable. L’amour c’est ce qui donne de la force pour faire les choses, pour se lever le matin. Et puis comme sujet de BD, c’est un thème simple et universel, qui touche tout le monde. On a envie d’aimer et d’être aimé, non ?
Dans ton travail, qui ou quoi t’inspire ?
Tous les récits autobiographiques, d’autrices plus particulièrement. J’adore lire la vie des autres. Les BD de Julie Doucet. Le travail d’Anna Haifisch et de Catherine Meurisse. Et sinon les films. Pendant les vacances j’ai re-regardé les 24 portraits d’ Alain Cavalier, qui sont des portraits de femmes travailleuses. Il y en a sur une matelassière, une souffleuse de verre, une bistrotière… Il filme les détails d’objets et d’un quotidien. Ça me fascine et ça m’émeut ! Et puis le travail des ami.es et des autres m’inspire. J’adore les dessins ou les planches de BD qui me donnent envie de dessiner. C’est une super sensation.
Quels sont tes outils et méthodes de création ?
Depuis quelques années j’utilise un peu les mêmes outils : je fais mon trait à la plume et à l’encre de chine. Puis j’imprime mon trait et je fais la couleur avec des encres acryliques. Concernant ma méthode de création, je n’en ai pas vraiment. Tout au long de l’année, je dessine dans mon carnet, et quand je dois trouver des idées ou des nouveaux personnages, je pioche dedans. C’est ma base de données.
Nous voilà en janvier, mois des bonnes résolutions et des prédictions : quels sont tes prochains objectifs ou projets ?
Je ne prends pas de bonnes résolutions, j’essaye déjà de me lever pas trop tard le matin. Je n’ai pas d’objectifs non plus, mais je me souhaite d’être heureuse et d’essayer de travailler sereinement. Et sinon en 2024 sort mon premier livre, c’est déjà pas mal !