RDVC / Spero Lucem (In Paradisum)

 

Il ne fait nul doute que les façons d’ecouter la musique sont multiples et que chacune revêt des qualités singulières. Aujourd’hui, nous n’écoutons pas la musique comme au XVIe siècle et nos âmes ne lui accordent pas la même réception. Si nous avons gagné en diversité, en divertissement et en proximité avec les artistes, nous avons sans doute perdu en sensibilité et en introspection. Aussi, le label In Paradisum, dans le cadre des Rendez-Vous Contemporains de l’Église Sainte-Merri, met-il en place l’événement Spero Lucem qui convoque trois de ses plus illustres entités (MondkopfSomaticae et Saåad) et le groupe canadien ThisQuietArmy. Souhaitant renouer avec le format des concerts spirituels apparus à la fin du 16e siècle, le label parisien propose à ces artistes de venir se confronter au lieu et d’offrir un concert unique où les musiques drone, ambient, noise des quatre intervenants s’entremêlent, se chevauchent, s’harmonisent et se déchirent dans une grande communion musicale et spirituelle. Le 28.01 à l’Église Sainte-Merri, à Paris.

Pour aller plus avant avec ce concept pour le moins rare, nous avons souhaité poser quelques questions au responsable de ce bazar, le manager du label In Paradisum, Guillaume Heuguet.

Kiblind : Pouvez-vous nous expliquer le concept de Spero Lucem ?

Guillaume Heuguet : C’est une invitation que j’avais envie de proposer aux artistes du label, pour mieux faire ressortir leurs approches respectives du drone et de la dimension spirituelle de la musique. C’est quelque chose qui revient souvent chez eux, mais selon des influences très différentes : pour certains, ce qui compte c’est la perte de l’ego, pour d’autres c’est une sensibilité pour certaines harmonies. A chaque édition, en fonction du lieu, j’invite certains artistes, qui vont travailler à partir d’une note continue d’orgue qui tourne sur six enceintes. Ils vont tenter de se l’approprier à leur façon, tout en se positionnant vis à vis des autres. Il ne s’agit pas du tout de proposer un supergroupe où tout le monde contribuerait à un jam de synthétiseur mystique. C’est plutôt une tentative, un exercice de style. Mettre ce drone-là au centre dans le contexte de St Merry, c’est une manière d’essayer de pousser les ressources et la démarche de chacun à bout. Et d’observer ce qui se passe.

Kiblind : Qu’est-ce que ce genre d’expérience peut apporter de nouveau au public ? À vous ?  À quel point le lieu peut-il interférer dans les compositions et improvisations des artistes ?

Guillaume Heuguet : Pendant les répétitions, on apprend tous pas mal sur ce qui fait la personnalité musicale de chacun et donc sur nos différentes relations à la musique, que ça soit techniquement ou esthétiquement. Par exemple, le fait de partir de la même note continue aiguise les différences qu’il peut y avoir entre la musique de Saaad et celle de Somaticae. Pour l’importance du lieu, on n’a malheureusement pas pu y faire les premières répétitions, donc on le saura le jour du concert.

Kiblind : Avez-vous souhaité retrouver une sorte de communion, de transe collective autour de la musique avec cet évènement ?

Guillaume Heuguet : Pas forcément à mon niveau. Personnellement, je trouve qu’il y a toujours un côté inquiétant ou en tout cas de provisoire dans les moments de communion musicale. Le catalogue d’In Paradisum oscille entre des choses très triviales, de la dissonance, du déchet, de l’impur, de l’exagération. Mais aussi parfois une volonté de se transcender par la musique, d’y trouver de l’harmonie, de la beauté, du sacré. J’aimerais qu’on puisse vivre cette contradiction dans ce format particulier, que la recherche de la transe puisse être le parti pris d’un groupe, mais pas d’un autre. Quitte à ce que ça soit inégal ou déstabilisant. Mais qui sait ce qui arrivera ?

Kiblind : La « démocratisation »  du drone et de l’ambient, musiques introspectives s’il en est, peut-elle participer à un retour de ce type de relation sensorielle à la musique et au format concert ?

Guillaume Heuguet : Pris globalement, le drone et l’ambient peuvent nous apprendre à être plus sensibles au son, mais il y a autant de formes de drone qu’il y a de formes de méditation, de concentration, d’écoute, et d’oppositions entre elles.

Kiblind : Pourquoi avoir choisi ce principe d’interaction entre les différents artistes présents ? Que pensez-vous en retirer ?

Guillaume Heuguet : C’est une manière de s’intéresser aux limites de notre rapport à la musique. Avec In Paradisum, ça nous intéresse beaucoup : qu’est-ce qu’il se passe quand on fait jouer Amédée De Murcia & Guillaume Mikolajczyk avant Godflesh ? Aujourd’hui, on valorise beaucoup l’éclectisme musical. Comment faire pour que l’ouverture ne soit pas une forme de tolérance molle ? On s’intéresse beaucoup avec Paul (Mondkopf) à ce qui touche aux extrêmes ou aux formes étranges dans chaque démarche musicale. On a pu aimer des choses qui nous paraissaient très loin de nous a priori, que ce soit dans la techno, le métal ou ailleurs. J’espère que travailler sur ce genre de projets permettra de créer des choses inattendues. Si cette tentative là ne marche pas, on essaiera d’autres choses.

Kiblind : Pouvez-vous nous présenter un peu plus le groupe canadien, ThisQuietArmy qui vous accompagne et nous expliquer sa présence ?

Guillaume Heuguet : Cette soirée est une co-programmation avec la Biennale Nemo, qui soutiennent This Quiet Army. Il travaille aussi sur une forme de musique drone, mais de manière assez différente de nos trois groupes. J’espère que ça sera aussi une source de contrastes intéressante.

 

 

 

 

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