À Lyon s’est ouvert une galerie pour le moins iconoclaste. Espace à durée déterminée, la Taverne Gutenberg entend profiter de ce court laps de temps pour faire passer le message d’une création débridée et d’une liberté à toute épreuve. Voici quelques-unes de nos impressions à l’occasion de l’exposition orgiaque En Conversion qui s’y est déroulée du 19.11 au 2.12. En attendant la prochaine surboum, le 10.12 à l’occasion du vernissage de l’exposition L’immeuble Vivant.
Les couloirs défraichis sentent la peinture fraîche, Henri Lamy et Maïa d’Aboville m’accueillent dans leur Taverne Gutenberg, les vieux journaux chuchotent aux pinceaux, les bombes répondent aux pinceaux. Comme son nom ne l’indique pas, pas de débit de boissons, ni lieu de restauration, cette Taverne vient plutôt nourrir l’esprit, abreuver le regard d’un hétéro-bordelo-artistico-cataclisme. Au menu: une trentaine d’artistes sont venus peindre et dépeindre le souvenir, l’abandon, l’organique, le moderne.
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Déchirant, collectant, graffant les tapisseries qui perdent leur peau, ces artistes pour la plupart lyonnais marquent ainsi l’étape d’ une mue nouvelle pour ce lieu chargé d’histoire. Ici, les murs ont entendu de leurs oreilles sourdes les discours militants des résistants FLN, caressé plus tard la chevelure de filles de joie, à l’aube des années 2000, ils seront habités avant d’être complètement abandonnés. Hantés par toutes ces âmes, le lieu donne à voir autant qu’il donne à penser le monde moderne, dont le passé résonne, rendant aux vivants le poids des morts, accueillant la destruction créatrice pour trois mois.
Cette vie moderne qui se traduit dans l’abandon, ces corps de mur qui s’effondrent, s’effritent, s’enfoncent et se délitent, comme une fenêtre ouverte sur l’art du quotidien, qu’il soit sur toile ou dans la rue, la Taverne brouille les frontières en invitant le populaire dans la galerie, un beau voyage poéticoartistique exaltant.
Lieu de création autant que d’engagement, la galerie propose aussi des ateliers de peinture avec les enfants du quartier. La galerie bien qu’institutionnalisée a su jouer des codes pour les détourner.
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Le drapeau blanc « Eurêka » à l’entrée nous l’avait bien dit, ici agit une belle bande de génies. Cherchant à décloisonner l’art contemporain dans un méli mélo merveille, les murs inanimés reprennent vie, comme un temps pétrifié, gelé dans son essence.
Des oeuvres nous ouvrent des perspectives détrônées de leur format, quand d’autres crient à l’encre blanche sur des murs en fracas.
Expérience sensorielle immersive où la nature morte côtoie l’article de bazar, où le figuratif côtoie le voyage sonore bizarre, où tout n’est qu’un et tout à la fois. A chacun d’explorer les deça du visible, d’aller soulever les rideaux vieux chic vieux genre de l’immeuble, s’abstraire en super 8 dans la puissance du jour blanc et de la brume, s’absoudre dans des sculptures de verre, comme une poésie de la fragilité, une allégorie de la matière transformée. À nous d’ouvrir les frontières-fenêtres du dehors et du dedans, du passé et du présent.
Entre contemplation cosmique et projections vidéo épileptiques, à nous de vous frayer un chemin dans un huit clos qui fourmille de regards et d’humour dans le détail, car ici ça déborde sur le sol, ça débite hors cadres, ça mitraille!
Rendez-vous le 10 décembre pour vous perdre dans cet immeuble devenu tableau, où chaque geste participe à l’esquisse, invitation dans un décor expéri-mentalo-psychédélice.
Taverne Gutenberg // Vernissage de l’exposition L’Immeuble Vivant, le 10.12